Guillaume Cairou, président-fondateur du groupe Didaxis et auteur du livre « Tous indépendants », a été reçu à BFM Business Club, par Michel Picot, pour échanger sur la place du portage salarial en France et la nouvelle dynamique entrepreneuriale.
Le portage salarial peut-il constituer une première étape vers la création d’entreprise ?
« En France, on compte moins de 10% de travailleurs indépendants. En observant la typologie des actifs, nous pouvons voir qu’il y a de plus en plus de travailleurs nomades qui passent d’une activité à une autre, tant est que créer son activité devient compliquée dès lors qu’on utilise les statuts classiques comme la micro-entreprise ou la SASU.
Ces travailleurs choisissent alors de revenir à des statuts de salariés mis en avant depuis très longtemps par des structures telles que des entreprises de portage salarial, mais aussi les coopératives d’activité et d’emploi, ou les couveuses. Ces formes d’emploi permettent à des individus de pouvoir exercer une activité indépendante avec le statut salarié.
Ces dispositifs ont explosé en France. En 10 ans, nous sommes passés de 5 000 à 100 000 travailleurs portés que j’appelle pour ma part des co-workers, car ce sont des indépendants qui travaillent les uns avec les autres, en réseau. Ces nouvelles formes d’emploi répondent à la volonté des Français d’innover, de créer et de travailler autour d’une économie collaborative.
Le portage salarial permet à tous ces Français de devenir indépendant avec le statut de salarié. L’entreprise de portage salarial est cette plateforme qui permet à ces travailleurs autonomes d’exercer un deuxième métier ou d’en faire une activité principale. »
Quels sont les visages de ces indépendants ?
« Ce sont les 51% de Français qui ont envie de tenter l’aventure indépendante et qui constituent un véritable levier à la création d’emplois pour notre pays. Cela représente aujourd’hui plus de 100 000 emplois, et à l’horizon 2030 ans se sera probablement plus d’1 million d’emplois sous ces formes hybrides. Ils travaillent dans les domaines de l’intelligence artificielle, de la cybersécurité, du digital…
Ces indépendants exercent des métiers qui n’existent pas encore (près de 83% des métiers de 2030 n’existent pas encore) et pour lesquels il n’existe pas réellement d’association professionnelle. Les entreprises de portage salarial servent alors de plateformes au développement des métiers du futur. »
Les français sont-ils prêts à être indépendants ?
« 1 Français sur 2 a envie de créer une entreprise. Mais créer une entreprise en France est très compliqué et certains n’osent pas se lancer. Notre nouveau gouvernement a inscrit dans son programme cette initiative individuelle et souhaite faire la promotion de l’esprit d’entreprise dans notre pays. Cela commence notamment par le développement d’un certain nombre de nouveaux métiers et de statuts qui vont permettre à des acteurs Français de se développer sous de nouvelles formes.
Notre organisation du travail est changeante et la mentalité des Français aussi à l’égard du travail. La jeune génération a envie de créer, d’être autonome et tire ainsi la dynamique entrepreneuriale vers le haut. De l’autre côté, nous avons des seniors qui souhaitent exercer leur métier à leur façon et pas forcément 35h/semaine à durée indéterminé. Avec cette nouvelle dynamique, nous allons pouvoir créer près de 1,5 millions d’emplois indépendants. Le portage salarial et les nouvelles formes d’emploi permettent le développement de ces nouveaux emplois non-salariés. Si la croissance de notre pays est passée au-dessus de la barre des 2%, c’est bien que cette dynamique fonctionne. »
Qu’en est-il de la protection de ces nouveaux travailleurs ?
Qui dit nouvelle forme d’emploi dit nouvelle forme de protection sociale. C’est au cœur du sujet. Le programme du président est dans la protection et la flexibilité des emplois. On parle alors de la protection sociale, de la couverture en cas d’accident du travail, et de la problématique du logement. Aujourd’hui les Français n’ont plus envie de travailler 10 ans dans la même entreprise à temps plein. Ils recherchent à avoir différents métiers dans différents secteurs et veulent une protection qui s’adaptent à leurs eux. Nous sommes en train de revenir à une économie plus collaborative et coopérative et de faire le lien avec notre passé de travailleurs : artisans, commerçants et agriculteurs. »
Valorisons nos métiers, valorisons nos territoires et dynamisons l’emploi sous toutes ces formes